Tàijí quán style Chén : de quoi parle-t-on ?

Le poing protège le cœur est un site dédié à mes cours et apprentissages, tous deux issus du Tàijí quán style Chén [Taichi Chuan style Chen], et plus précisément, de la lignée de Chén Zhèngléi. Pourquoi ces précisions sont-elles importantes ? qu’est-ce qu’un style de Tàijí ? quelles sont les caractéristiques spécifiques du style Chén…


Le poing protège le cœur est un site dédié à mes cours et apprentissages, tous deux issus du Tàijí quán style Chén [Taichi Chuan style Chen], et plus précisément, de la lignée de Chén Zhèngléi.

Pourquoi ces précisions sont-elles importantes ? qu’est-ce qu’un style de Tàijí ? quelles sont les caractéristiques spécifiques du style Chén ?  faut-il aller au-delà des distinctions de styles ?

Choisir un style de Tàijí quán est une décision personnelle, qui relève souvent de critères autrement plus pragmatiques que le choix entre des caractéristiques de styles différents : proximité des cours, qualité de l’enseignement ou encore dynamique de groupe. Ce qui est certain, c’est que seule la pratique permet d’éclaircir précisément les différences entre les styles et les écoles, et qu’il est bien difficile de faire une comparaison impartiale. Le meilleur style est celui que vous choisirez pour une pratique sur le long terme !

Les 5 styles majeurs de Tàijí quán

Cinq styles majeurs sont recensés aujourd’hui ; ils portent les noms de famille de leurs créateurs :

  • Style Chén陈
  • Style Yáng杨
  • Style Wú吴
  • Style Wǔ武 (ou Wǔ/Hǎo)
  • Style Sūn 孫

氏Shì signifie « style » ou « clan », ce qui évoque les modalités de transmission liées à l’appartenance au clan, à la famille. Le Tàijí quán était jusqu’à très récemment considéré comme secret, transmis uniquement au sein même des clans familiaux.

Depuis sa création (sur la base des preuves historiques fiables qui datent du XIXème siècle), il s’est développé en plusieurs écoles, qui sont les marques d’autant de styles et de maîtres.

Le style Chén 陈氏 est le plus ancien des 5 styles, caractérisé par des postures basses et une grande mobilité.

Le style Yáng 杨氏 est le plus répandu des 5 styles, avec des mouvements amples et des cercles verticaux mais plus statique que le style Chén.

Le style Wú 吴氏 privilégie les cercles horizontaux, dans des mouvements d’ampleur moyenne et des posture inclinées. Il est parfois confondu avec le style Wǔ/Hǎo, plus récent et plus populaire. Si cet autre nom de famille 武 (Wǔ) est distinct par son sinogramme et sa prononciation, il est souvent transcrit de la même manière, créant la confusion.

Le style Style Wǔ (ou Wǔ/Hǎo) 武氏, caractérisé par des mouvements denses et compacts.

Le style Sūn 孫氏, caractérisé par des gestes souples mais peu extériorisés, et une grande place accordée au travail interne.

Principales caractéristiques du Tàijí quán style Chén – 太極拳陈氏

Le style Chén se distingue des autres par ses postures basses et la mobilité des mouvements. Pour cette raison, il peut être considéré comme plus exigeant au niveau physique. Il n’en reste pas moins qu’il est possible de moduler l’intensité en fonction de sa condition physique et de ses objectifs.

Ses principes caractéristiques sont l’alternance de mouvements lents et d’accélérations, les trajectoires circulaires des mouvements ou « force enroulée comme de la soie » – 缠丝劲 chánsī jìn, ainsi que des explosions de force lui donnant un aspect plus martial en apparence, en particulier dans la forme dite « poings canons » – 炮捶 pào chuí. De nombreux autres principes régissent la pratique du Tàijí quán style Chén, dont la plupart sont communs à tous les styles.

Brève histoire du Tàijí quán style Chén 太極拳陈氏

Chen Wangting (陈王庭, Chén Wángtíng), qui aurait vécu entre 1600 et 1680, a mis au point les premiers enchaînements, dont le poing canon, puis les armes (sabre, lance, épée, bâton) et le tuishou ou « poussée des mains » pour travailler l’énergie spiralée à deux.

C’est Chen Changxing (陈长兴, Chén Chángxīng ; 1771-1853) descendant de la 14ème génération de la famille Chén qui transmit, il y a environ 200 ans, le Tai Chi Chuan reçu de manière directe par Chén Wángtíng, également au-delà du cercle familial. Parmi ses célèbres disciples, Yáng Lùchán – connu comme fondateur du style Yáng est notamment son élève.

D’abord cantonné au sein du village de Chenjiagou (陈家沟 – Chénjiāgōu) avec un enseignement réservé aux seuls membres du clan Chén, le Tàijí quán style Chén s’est propagé à partir de 1928, année où Chen Fake (陳發科- Chén Fākē ; 1887-1957) de la 17ème génération, commença son enseignement à Pékin. Le maître Chen Zhaopi de la 18ème génération, tout comme son plus jeune fils Chen Zhaokui, ont consacré leur vie au développement du Tàijí quán, et comptent parmi leurs élèves les quatre grands maîtres ou « quatre grands gardiens célestes » (parfois nommés les « quatre Bouddhas » – 四大金刚 -sìdàjīngāng – du Taiji Quan), à savoir quatre pratiquants de la 19ème génération : Chén Xiǎowàng (陳小旺 ; 1945), Chén Zhèngléi (陈正雷 ; 1949), Wáng Xī’ān (王西安 ; 1944-2024), Zhū Tiāncái (朱天才 ; 1944).

L’expression « quatre grands gardiens célestes » – sìdàjīngāng est empruntée à la mythologie bouddhiste. Il s’agit de quatre divinités protectrices, une pour chacun des points cardinaux, dont il existe de nombreuses représentations peintes où sculptées à travers la Chine.

sìdàjīngāng – mythologie

Ces « quatre rois célestes », dieux musclés et protecteurs, sont des figures colossales qui gardent l’entrée des temples taoïstes et sont aussi appelés « les quatre porteurs de foudre ». Selon Catherine Despeux, « la foudre » est une série de divinités bouddhiques, gardiennes de la doctrine, dompteuses des démons et influences maléfiques ; elles jouent un rôle essentiellement protecteur.

Le premier mouvement de la forme du Tàijí quán style Chén, « Le gardien des cieux pile le mortier » 金刚捣碓  jīn gāng dǎo duì, fait référence à ces divinités.

C’est le nom de ce premier mouvement – emblématique du style Chén – qui aurait été symboliquement donné aux « quatre grands Jin gang » à titre honorifique, quand le pouvoir chinois a commencé à promouvoir la pratique du Tàijí quán à l’international. Une autre hypothèse, plus prosaïque, indique que ces quatre pratiquants auraient été présentés en introduction d’une démonstration comme les 4 Jin Gang (un peu comme on aurait dit « Et voici les trois mousquetaires »). L’expression serait restée !

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Tàijíquán sìdàjīngāng

Chacun son style ?

Même à l’intérieur du style Chén, il est possible d’avoir des diversifications dans les formes et la façon d’exécuter les mouvements. Elles restent cependant globalement organisées autour de la filiation des 4 grands maîtres ou « quatre grands gardiens célestes ». Par ailleurs, il existe toujours une affiliation officielle, de maître à disciple, qui se compte en nombre de générations et qui est toujours pratiquée à Chenjiagou, garantissant la transmission dans le respect des maîtres et écoles.

Quel que soit le style que vous choisissez, quelle que soit l’école que vous choisissez au sein d’un style donné, vous en tirerez toujours les bénéfices du taichi, comme la mobilité, le relâchement, l’équilibre, la souplesse ou encore le développement de l’énergie.

Par ailleurs, avec la pratique du Tuishou (推手 ; tuī shǒu ou « poussée des mains »), vous trouverez une possibilité d’interaction particulièrement intéressante pour aller au-delà des distinctions entre les styles et les écoles. En effet, dans le travail à deux, peu importe le style quand on travaille à la qualité du contact, à l’écoute, aux transformations, à la compréhension de la tactique et de l’énergie, qui sont des principes universels du Taiji quan au-delà des différences stylistiques.


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